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Réseau des Démocrates

Saint Saens et Camus

 

 

Djamel Eddine Merdaci

Saint-Saëns et Camus

Camille Saint-Saëns est un illustre compositeur français. Il ne serait pas même exagéré de dire qu'il est l'une des plus grandes figures de la musique universelle en raison de la diversité et de l'éclatante beauté de son œuvre. Le nom de Saint-Saëns est fortement attaché à Alger où il est mort en 1921 à l'âge de 86 ans. Il avait été de longues années auparavant un familier de la ville, presque un de ses enfants, tant ses séjours y étaient fréquents.

 

Dès les premières années de la présence coloniale française, Alger avait été une destination, et autant dire un passage obligé. Le peintre Eugène Delacroix avait été le premier à y entreprendre un voyage consacré par le célèbre tableau Femmes d'Alger dans leur appartement  qui allait ouvrir la vue au courant orientaliste. Bien des artistes et auteurs lui avaient emboité le pas, à commencer par Flaubert et Dumas qui avaient fait le voyage de Constantine, et André Gide qui s'était établi à Biskra. L'attachement de Saint-Saëns à Alger, en raison de sa durée, ne tenait pas à la recherche  du dépaysement violent ou de l'inspiration car au fond son œuvre n'est pas imprégnée d'une influence algérienne. Même s'il était assez souvent dans la proximité de la musique algérienne pour avoir transité par La Casbah d'Alger et écouté en ces occasions des orchestres de la ville. Saint-Saëns était le contemporain de compositeurs qui puisaient leurs thèmes dans les musiques originelles.

 

Antonin Dvorak a ainsi nourri sa symphonie du nouveau monde de référence au folklore des Indiens d'Amérique. Ce n'est pas le cas de Saint-Saëns qui a décliné le patrimoine musical algérien dans une ou deux compositions sans en faire la substance de son œuvre. Pas plus que ne l'avait fait le compositeur Bela Bartok à l'issue de son séjour à Biskra. L'explication la plus évidente est que le génie personnel de Saint-Saëns le dispensait d'emprunts pour compenser une imagination musicale défaillante. Sans doute faut-il considérer que son lien à Alger était d'une autre nature et qu'il avait aimé la ville pour elle-même. S'il a eu en projet de lui rendre hommage, il n'en a manifestement           pas eu le temps. Ou alors il faudrait mener des recherches dans les archives qui lui sont dédiées pour obtenir des réponses convaincantes. Bien qu'il y ait désormais peu d'éléments attestant de la mémoire de son passage à Alger. Alors que l'histoire s'écrit aussi avec ces segments, voire ces sédiments, de destins personnels.

Il n'est besoin pour s'en convaincre que de mesurer la place que prend par exemple un Albert Camus dans l'inconscient collectif de l'intelligentsia algérienne d'aujourd'hui alors qu'il n'y a pas plus de traces de sa présence sur cette terre que celle de Saint-Saëns. Et d'ailleurs, ils étaient l'un et l'autre des contemporains. Camus avait déjà huit ans à la mort de Saint-Saëns dans un hôtel algérois. Mais la trajectoire de l'écrivain est évidemment plus forte de questionnements que celle du tout de même prestigieux compositeur. Mais pour l'un comme pour l'autre, bien des questions restent encore sans véritable réponse. Et la plus essentielle d'entre elles, plus pour Camus que pour Saint-Saëns, est celle de savoir s'ils sont définitivement des étrangers.

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