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7 Janvier 2011
vendredi 7 janvier 2011, par La Rédaction
Un conseil interministériel se tiendra samedi 8 janvier pour examiner les moyens de juguler la flambée des prix des produits alimentaires à l’origine des émeutes en
Algérie, a annoncé vendredi le ministre du commerce, Mustapha Benbada.
Cette réunion sera consacrée essentiellement aux lois relatives à la concurrence et aux pratiques commerciales, en particulier la définition des marges bénéficiaires des produits de large
consommation. Un groupe de travail de responsables du ministère, de producteurs et de transformateurs des produits de base a été également mis en place jeudi afin de mettre en œuvre des textes
réglementant les marges.
La hausse subite et importante des prix des produits enregistrée début janvier a provoqué des manifestations violentes depuis mercredi dans nombre des quarante-huit départements d’Algérie.
Vendredi, jour hebdomadaire de repos, la situation était redevenue quasi normale. Toutefois, la police entourait les mosquées des quartiers sensibles de la capitale et les autorités ont annoncé
le report de tous les matches du championnat de football, craignant notamment une reprise des manifestations après la prière du vendredi. Ni la presse officielle ni les autorités n’ont commenté
jusqu’à présent ces manifestations contre les hausses de prix, allant jusqu’à 30 % pour certains produits de première nécessité depuis le 1er janvier.
Dans le quartier proche de l’aéroport de Bab Ezzouar, la police surveille également un tout nouveau centre commercial de luxe inauguré l’été dernier et accolé au grand hôtel Mercure. Quant à
l’université toute proche, elle était encerclée. Selon des voyageurs, l’autoroute est-ouest reliant Alger à sa partie est sur le littoral a été bloquée jeudi après-midi. Des groupes de jeunes,
qui ont affronté violemment les forces de l’ordre dans la soirée, y avaient installé des barricades forçant les véhicules à rebrousser chemin.
A Alger, les rues ont retrouvé leur aspect quotidien vendredi matin après avoir été nettoyées. Les véhicules calcinés ont été enlevés à l’aube. Dans le quartier populaire de Bab el Oued, où des
affrontements violents ont opposé jeudi soir des groupes de jeunes à des policiers armés, qui ont fait usage de gaz lacrymogènes, il ne restait plus de débris dans les rues, selon un photographe
sur place. Un témoin a affirmé avoir vu des jeunes lancer des cocktails Molotov.
Les émeutes lancées en Algérie par des groupes de jeunes s’étaient étendues jeudi soir et avaient gagné en violence sans qu’il ait été fait état de victime, selon de nombreux témoins et la
presse. Aucun bilan n’a été communiqué de sources officielles. Le journal algérien El-Watan week-end a fait état de "blessés", sans plus de précisions. Le quotidien souligne la ressemblance entre
ces émeutes et celles d’octobre 1988, qui allaient entraîner l’effondrement du système du parti unique (FLN). Le 4 octobre 1998, des manifestations de jeunes avaient éclaté à Alger pour protester
contre la hausse généralisée des prix et la raréfaction de produits de première nécessité, avant de s’étendre à d’autres villes.
"La situation actuelle présente de troublantes similitudes avec celle qui a précédé octobre 1988. En plus des pénuries et de la hausse des prix, il y a la rumeur", analyse le quotidien
électronique Tout sur l’Algérie, qui évoque les "folles suppositions" suscitées par les "absences prolongées" du président Abdelaziz Bouteflika et estime que "la course à la succession est
presque officiellement ouverte". Et de conclure : "L’hiver 2011 promet donc d’être plus chaud que tous les hivers de la décennie écoulée".
De nombreux quartiers d’Alger ont été touchés par les émeutes jeudi dans le centre et la périphérie, amenant nombre de commerces à baisser leurs rideaux dès le début de l’après-midi et le
centre-ville était vide de voitures en début de soirée, mais bondé de jeunes gens, raconte El-Watan dans un autre article. Le quartier huppé d’El Biar, situé sur les hauteurs, a été pris d’assaut
par une quarantaine de jeunes armés de sabres qui se sont attaqués à de nombreuses boutiques en début de soirée, ont constaté des journalistes. Ils ont saccagé un restaurant et vidé une
bijouterie, emportant un important butin selon les habitants du quartier, avant de se trouver encerclés par les forces de sécurité.
A l’est d’Alger, en direction de l’aéroport, des abris de tramway encore en construction ont été saccagés. Dans le quartier dit "des Bananiers", lors d’un face-à-face avec la police, des
manifestants ont lancé des pierres contre les policiers pour les empêcher de traverser un pont. Dans le quartier est de Belcourt, une zone pauvre aux maisons à moitié détruites et très densément
peuplée, des pneus ont brûlé dans des rues bondées, où peu de voitures s’aventuraient. Un peu plus haut sur les collines, un témoin a raconté avoir vu un second garage Renault incendié, tout
comme celui, mercredi soir situé à Bab el Oued. Le site du consulat de France a recommandé dans la soirée la plus grande vigilance à ses quelque 23 000 ressortissants de la wilaya d’Alger.
En Kabylie, à Bejaia, 260 kilomètres à l’est d’Alger, tout comme à Boumerdes, plus proche de la capitale, les manifestants avaient dès l’après-midi coupé les routes principales avec des arbres
notamment ou des pneus enflammés. Selon un témoin, le tribunal d’Akbou, près de Bejaia a été incendié en fin de journée. Un peu plus loin, vers la frontière tunisienne, à Annaba, les forces de
sécurité se sont renforcées surtout autour des bureaux de la wilaya (département), mais la situation était calme. Par contre, la contestation a gagné plusieurs quartiers populaires de
Constantine, la grande métropole de l’Est algérien, en début de soirée, où des manifestants ont coupé plusieurs routes avec des pneus en feu, a indiqué un habitant.
(Vendredi, 07 janvier 2011 - Avec les agences de presse)
Al-Oufok
- الأفق -
Eva Onichtehenko
Journaliste
Bruxelles