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Rencontres d’Averroès (1/4): Syrie-Irak, une faille géopolitique

 

 PAR LES RENCONTRES D'AVERROÈS

Mediapart diffuse la nouvelle édition des Rencontres d’Averroès, qui contribuent à penser la Méditerranée des deux rives. L’édition 2016 a rempli le théâtre de la Criée à Marseille. Premier volet consacré en particulier à la situation au Proche-Orient et à la Syrie, avec Bassma Kodmani, Myriam Benraad, Marc Pierini et Bertrand Badie.

 

 

Pour ce débat consacré à la faille géopolitique, alors que le martyre d'Alep ne cesse de s'accentuer, étaient réunis Bertrand Badie (professeur des universités à Sciences-Po Paris, spécialiste des relations internationales), Myriam Benraad (politiste, spécialiste de l’Irak, chercheur à l’Iremam et à la Fondation pour la recherche stratégique), Bassma Kodmani (politiste, cofondatrice du Conseil national syrien, directrice de l’Initiative Arab Reform) et Marc Pierini (ancien ambassadeur de l’Union européenne en Syrie, en Tunisie, en Libye et en Turquie).

Le monde méditerranéen est aujourd’hui en miettes : violence, chaos, guerres civiles, terrorismes, bombardements, exilés et naufragés… Après l’espoir né des printemps arabes, au lendemain des soulèvements pour la liberté en Tunisie, en Égypte, en Libye et en Syrie, l’heure est au grand hiver de l’oppression, de la répression et de la fragmentation. Comment regarder ce désastre en face, tout en refusant d’y consentir et de s’y enfermer ? Y a-t-il un après du désastre ?

L’onde de choc de l’histoire qui parvient jusqu’à nous est profondément reliée à l’histoire récente du Moyen-Orient et en particulier aux guerres du Golfe. La projection de forces des interventions américaines et plus largement d’une coalition « occidentale » en Irak, comme le souligne Myriam Benraad, a profondément bouleversé le paysage géopolitique de la région.

Après la chute de Saddam Hussein, la marginalisation d’un pouvoir sunnite, la montée en puissance d’un pouvoir chiite, l’affirmation d’une autonomie kurde… plus rien ne peut être comme avant. La désagrégation est à l’œuvre, encore plus depuis la dissolution de l’armée baasiste sur décision du gouverneur américain en Irak, Paul Bremer. Comment naît le projet de Daech, ce prétendu « État islamique » ? Une généalogie de la violence, depuis l’Irak des années 1990 à celui d’aujourd’hui, est sans doute indispensable pour tenter de dépasser les dynamiques de la confrontation qui se propagent jusqu’à l’intérieur des sociétés européennes.

Une telle généalogie de la violence et de la guerre est également nécessaire à partir de la Syrie, comme le suggère Bassma Kodmani. Le pouvoir des Assad père et fils, depuis la répression sanglante de Hama dans les années 1980 jusqu’aux bombardements aveugles de Homs ou d’Alep aujourd’hui, doit être profondément questionné – à travers l’analyse des mouvements de contestation de la société syrienne et de l’expression d’un désir de liberté face à l’oppression et à la répression du pouvoir, au commencement du mouvement, puis en intégrant les jeux actuels de puissance qui s’enchaînent, d’une part ceux de la Russie, de l’Iran et du Hezbollah qui soutiennent le régime de Bachar al-Assad, d’autre part ceux des pays du Golfe et de la Turquie qui soutiennent des forces islamistes, et enfin ceux des États-Unis et de l’Europe, largement indécis, qui soutiennent notamment des forces kurdes, tandis que leur allié turc, membre de l’Otan, bombarde dans le même temps les positions de ces mêmes forces kurdes… Alors que la guerre ne cesse de se prolonger et que les civils payent le prix fort de ces combats acharnés, avec près de cinq cent mille morts en Syrie et plus de cinq millions de réfugiés et de déplacés, une solution politique est-elle possible et pensable ? À partir de quels acteurs et selon quelles priorités ?

La réalité géopolitique turque s’est fortement complexifiée et opacifiée ces dernières années. Où va la Turquie, sur les plans national et international, comme le demande Marc Pierini ? D’une diplomatie néo-ottomane qui cherchait, il y a quelques années, zéro ennemi à ses frontières, à l’état de guerre actuel contre les Kurdes à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, le contraste est saisissant. Sans oublier, après la tentative de coup d’État de juillet 2016, les purges et la répression qui frappent de très larges pans de la société civile turque. Existe-t-il des perspectives de sortie de crise ? La Turquie devient-elle un bateau ivre sur le plan géopolitique ou a-t-elle vocation à reconstituer un pôle de stabilité ? Que signifie son rapprochement avec la Russie ? S’agit-il d’un positionnement de circonstance face à la guerre en Syrie ou d’un nouveau choix stratégique qui conduirait à un éloignement, voire à une sortie, de l’Otan ?

Peut-on alors porter enfin un autre regard sur l'« ordre international », comme y invite Bertrand Badie ? « Nous ne sommes plus seuls au monde », selon le titre de son dernier livre… De quel « nous » s’agit-il exactement ? D’un « nous » européen, américain, occidental ? Le désordre que l'on observe actuellement sur le plan international annonce-t-il la fin d’un monde et la naissance d’un nouveau ?

Ce débat est animé par Thierry Fabre et Daniel Desesquelle, journaliste et producteur à RFI.

 

 

 

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