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Un phénomène latent : la violence gangrène la société

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le 05.07.12 | 

 La société algérienne est gangrenée par une violence multiforme.

 

Un étudiant qui tranche la gorge de son camarade de promotion en plein cours, un autre qui poignarde son professeur pour une note contestée, une bru qui découpe en morceaux sa belle-mère, un père de famille qui égorge sa fille de 22 ans avant de lui taillader le corps à coups de couteau, sont-ils encore de banals faits divers qu’il faut s’empresser d’oublier en refermant le journal qui s’en fait l’écho ?

Homicides, suicides, crimes barbares, rixes sanglantes entre voisins, entre communautés ethniques, entre tribus, entre supporters d’équipes de foot rivales, il ne se passe pas un jour sans que les journaux algériens ne rapportent des rixes mortelles, des disputes meurtrières, des crimes sordides ou crapuleux. Certains journaux ont même fait de ces flots de sang leur pain quotidien en exploitant à fond le côté voyeurisme morbide du lecteur.

Une violence multiforme gangrène la société algérienne comme jamais auparavant. Parallèlement au terrorisme qui ensanglanta le pays depuis le début des années 1990, la violence a pris racine dans la rue, à l’école, à l’université, dans les stades, au sein de la famille, sur les routes et même dans des espaces censés être aussi sacralisés tels que la mosquée ou l’école. Les chiffres de la criminalité sous toutes ses formes explosent et de nouveaux phénomènes liés à la violence comme les kidnappings, les viols collectifs ou la guerre des gangs urbains sont apparus. Dans les nouvelles cités ghettos qui ont poussé comme des champignons à la périphérie des villes, les guerres de gangs font rage. On se bat au sabre comme au temps des conquêtes musulmanes.    

 

Le crime n’est plus lié à l’honneur

Le constat s’impose de lui-même, de plus en plus d’Algériens ont adopté cette exécrable particularité de régler leurs querelles à coups de couteau, de hache et de gourdin. Le plus grave est qu’on tue pour des futilités. Pour un mot de trop ou un regard de travers, un match de foot de quartier perdu, une cigarette refusée, un bout de tôle éraflée ou quelques malheureux dinars. C’est à croire que tout le monde dans ce pays se balade avec un couteau aiguisé, en se tenant prêt à trancher la carotide du premier quidam qui aura l’outrecuidance de le contrarier. La moindre altercation entre voisins, cousins ou automobilistes peut dégénérer en bataille à couteaux tirés !

Ce qui étonne et interpelle aujourd’hui est que cette violence est souvent le fait d’individus qui, logiquement, ne devraient pas avoir recours à ces procédés réservés habituellement aux grands délinquants évoluant en marge de la société. Ce ne sont pas des repris de justice ou des membres de gangs maffieux, qui ont, eux, recours à cette violence extrême. Ce sont des étudiants, des professeurs, des pères de familles bien sous tous rapports et des gens que rien apparemment ne prédisposait à de telles extrémités, qu’on retrouve dans ce rôle de boucher.  Les commissariats, les brigades de gendarmerie et les cours de justice étouffent sous le poids des affaires liées à la violence et les prisons sont surpeuplées. Surpeuplées, les prisons ne sont soulagées de leur trop-plein de pensionnaires que par le biais de grâces présidentielles répétitives.   

 

Que se passe-t-il donc ? Trop d’inégalités sociales

La société algérienne est gangrenée par une violence multiforme. On a beau multiplier les effectifs de police et de gendarmerie, rien n’y fait. Individuelle ou collective, la violence est partout. Elle est également dans les inégalités sociales de plus en plus exacerbées. Le fossé est devenu aussi béant qu’indécent entre une caste d’affairistes et de rentiers qui étalent leurs richesses entre villas somptueuses et 4x4 rutilants et des classes sociales qui peinent à assurer le sachet de lait et le pain quotidiens. L’émeute est devenue le seul canal d’expression de masse que l’Etat aura laissée à une population désemparée par le cumul d’un nombre incalculable de problèmes liés au sous-développement.

Une pénurie d’eau dans une localité ou une distribution de logements finissent pratiquement toujours par une émeute où l’on brûle, saccage et détruit. Couper une route nationale à la circulation et prendre en otage des milliers d’automobilistes est devenue la nouvelle forme de protestation la plus en vogue.

Chaque année, la route fauche la vie de près de 4000 Algériens. L’étroitesse d’esprit fait plus de ravages que celle des chaussées. L’incivisme et le non-respect du code de la route font le reste. Bras d’honneur, insultes, crachats et bagarres sont des faits quotidiens. Le moindre espace de trottoir a été accaparé par des gardiens de parkings improvisés qui n’hésitent pas à brandir le gourdin ou le couteau face à l’automobiliste qui refuse de payer la «dîme» de 50 dinars, pour quelques minutes de stationnement. Le fait est aujourd’hui connu de tous, chaque automobiliste algérien cache sous son siège une bombe lacrymogène, une barre de fer ou un gourdin qu’il est prêt à brandir le cas échéant.

 

Un environnement agressif

La violence est d’abord verbale et gestuelle avant de devenir physique. Elle est également dans l’environnement immédiat d’une population livrée à elle-même. Elle est dans ces poubelles éventrées sur des trottoirs déglingués, ces saletés qui couvrent nos rues, ces montagnes de détritus qui jonchent l’espace commun. Elle est dans ce chaos urbanistique d’immeubles couverts de haillons et de paraboles, de villas jamais finies, de millions de sachets poubelles qui parsèment nos paysages, de cadavres de bouteilles sur les bas-côtés des routes. Elle est dans ces femmes et ces enfants obligés de recourir à la mendicité, ces milliers de jeunes sans avenir qui tiennent les murs ou tentent la «harga» dans des embarcations de fortune.

Pour des milliers de jeunes Algériens majoritairement issus de quartiers populaires, le stade est devenu le seul exutoire pour déverser leurs frustrations sociales et sexuelles.Chaque jour de match met les villes entières en état de siège et gare au malheureux citoyen qui se trouvera sur le passage des hordes vociférantes à leur sortie du stade.
Même l’école, ce lieu du savoir et de l’éducation, n’échappe pas à la règle. On ne compte plus le nombre d’affaires liées à la maltraitance et aux agressions des professeurs envers leurs élèves et vice-versa. Le phénomène du suicide, en plus de prendre des proportions alarmantes, touche désormais les enfants.         

Djamel Alilat
 
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