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Réda Hamiani. Président du Forum des chefs d’entreprises (FCE) Oui aux syndicats autonomes, mais on ne veut pas de surenchère de type trotskyste

 

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le 07.10.11 | 01h00 Réagissez

 

Une semaine après la tripartite, Réda Hamiani, le président du Forum des chefs d’entreprises (FCE), candidat à sa propre succession aux élections du 27 novembre, dresse un bilan du monde des affaires en Algérie et revient sur les attentes des chefs d’entreprise.

-Vous avez déclaré, jeudi dernier lors de la tripartite, que le gouvernement favorisait certains lobbys au détriment de la production nationale. A quels lobbys faisiez-vous allusion ?

C’est plus nuancé. Je voulais surtout souligner que notre pays n’avait pas le taux de croissance qu’il méritait au regard des 500 milliards de dollars d’investissement consentis par l’Etat depuis dix ans. Si vous ajoutez à cela un montant à l’importation à la hausse annuellement et qui atteindra 60 milliards de dollars cette année, nous pouvions espérer un taux de croissance à deux chiffres comparable à ceux de la Turquie ou du Brésil. Malheureusement, cela n’est pas le cas puisque, selon les chiffres du Fonds monétaire international, la croissance en Algérie sera comprise entre 3 et 4%.

Ce que je voulais en réalité dénoncer ce sont les principaux obstacles contre les producteurs, les créateurs de richesse et les chefs d’entreprise qui prennent des risques et qui décident de se lancer dans l’aventure industrielle. Les importateurs, eux, y trouvent leurs comptes. L’acte de commerce est dix fois plus facile que l’acte de production. J’en veux pour preuve la facilité avec laquelle les importateurs obtiennent un crédit auprès des banques comparativement aux investisseurs. Je n’affirme pas que le gouvernement soit complice des lobbys. Par contre les pesanteurs administratives, les lourdeurs bureaucratiques sont plus pénalisantes pour les producteurs que pour ceux qui sont dans le commerce.

-Vous avez également rappelé au gouvernement toutes les mesures vis-à-vis desquelles il s’était engagé et qu’il n’a pas appliquées. Pourquoi ces engagements ne sont pas suivis d’effet ?

On se pose la question. Pourquoi des orientations qui nous ont semblé majeures ne se sont pas retrouvées avec des conditions d’application à notre bénéfice. Je rappelle par exemple qu’on attend depuis des années un conseil de la concurrence, créé par une loi en 1995, refondue en 1998, 2003 et 2008, mais à chaque fois sans la présence des titulaires. Le ministre du Commerce, M. Benbada, s’est engagé à ce que ce conseil soit installé avant la fin de cette année. Nous serons attentifs à cette promesse. Il y a aussi le cas du Conseil supérieur de la fiscalité, institué par une loi en 1999 et qui n’a jamais été installé.

De même pour le Conseil supérieur de l’énergie, institué par l’ex-président Zeroual et qui n’a toujours pas vu le jour. Il y a le cas du «couloir vert» qui devait permettre aux producteurs de ne pas subir des contrôles douaniers sur le quai mais sur site, comme cela se pratique dans les autres pays. Cette promesse nous a été faite il y a quinze ans. J’ajoute les bureaux de change institués par la Banque centrale en 1995 et qui n’ont toujours pas vu le jour. Je trouve scandaleux que les devises s’échangent à Port-Saïd ou dans des boutiques à Hydra. C’est pour cela qu’on est perplexes et médusés de constater que notre gouvernement est animé par le souci de bien faire, prend de bonnes dispositions légales et réglementaires et qui sont ensuite mises dans le placard.

-Etes-vous favorable à la participation des syndicats autonomes aux prochaines rencontres ?

On refuse d’être entraînés dans ce débat. C’est d’abord un choix qui intéresse en premier lieu les salariés. Je rappelle qu’il y a plus qu’une organisation patronale, je ne vois pas pourquoi il n’y aurait pas d’autres syndicats. Nous sommes prêts à composer aussi bien avec l’UGTA, qu’avec les nouveaux venus, à condition qu’ils soient crédibles et responsables. On ne veut pas de surenchère de type trotskyste ou tomber dans un combat de lutte des classes. Toutes les parties prenantes qui voudront bien s’asseoir autour d’une table pour défendre les intérêts des travailleurs mais en sauvegardant ceux de l’entreprise sont les bienvenues.

-Pourquoi avoir refusé l’augmentation de 1% des charges patronales pour les retraites ?

Ce n’est ni un refus du gouvernement ni du patronat. Cette semaine, nous allons nous retrouver autour d’une table pour évaluer les conséquences de la suppression de l’article 87 bis et tenter de trouver de nouvelles ressources financières pour la caisse des retraites. Dans l’absolu, les marges de manœuvre dont disposent les entreprises sont inégales et souvent faibles, tout dépend des secteurs économiques où ils évoluent. Quand le gouvernement augmente le SNMG (salaire national minimum garanti, ndlr) des travailleurs, il dispose de la fiscalité ordinaire et pétrolière pour amortir les augmentations.

Quand le secteur public augmente le salaire des cadres, il peut recourir aux banques pour lui prêter main-forte. Par contre quand il s’agit de PME privées, nous n’avons pas sur quoi nous appuyer. C’est pour cela que je dis que nous ne sommes pas dans la même situation et qu’on ne peut pas donner l’argent qu’on n’a pas encore créé ni produit. Nous estimons qu’il faut d’abord voir si les mesures prises lors de la tripartite seront appliquées pour permettre à l’entreprise de se développer et pouvoir absorber les conséquences d’une augmentation des retraites ou du SNMG.

-Vous en êtes où du projet de fédérer les organisations patronales ?

Nous en sommes toujours au même point. C’est plus une question de leadership et de guerre des chefs qu’autre chose, alors qu’on se retrouve sur les mêmes thèmes. En réalité, c’est une histoire de proximité avec les cercles décisionnaires qui poussent les présidents des autres syndicats patronaux à ne pas vouloir lâcher leurs privilèges. Cela flatte leur ego et peut les aider dans leurs affaires personnelles. D’autant qu’il n’y a pas de divergences entre le patronat.

-Vous êtes partant pour un troisième mandat à la tête du FCE ? Ne pensez-vous pas qu’il est temps de laisser la place aux jeunes ?

C’est exactement ce que je pensais. C’est sur l’insistance de bon nombre de membres du Forum qui m’ont demandé de rester, car ils estiment que dans la période actuelle, le positionnement du Forum et sa crédibilité demandent qu’ils soient pérennes. Il ne faut pas qu’il y ait de rupture dans la conduite de notre association. C’est ce qui m’a convaincu de me représenter. Il faut un mandat de plus pour définitivement positionner le Forum comme une institution crédible qui représente convenablement les patrons, et les deux prochaines années permettront de préparer certains jeunes qui font déjà partie du Forum. Cela leur donnerait une meilleure connaissance du mouvement patronal, ainsi que de l’environnement aussi bien politique qu’administratif. Je rappelle que dans sa composante actuelle, la grande majorité des adhérents du Forum sont des seniors. C’est pour cela que nous sommes pour un passage du flambeau sans cassure, sans retournement brutal dans la conduite du Forum vis-à-vis des décideurs.

-Ne craignez-vous pas que la campagne qui s’annonce soit plus une campagne de coups bas que de programmes ?

Nous voulons au sein du Forum développer une image positive. Je pense que les candidats qui se risqueraient à utiliser des appréciations ou des raisonnements négatifs seront les grands perdants, parce que les membres du Forum, qui prônent la sagesse et la pérennité, les pénaliseront.  

Bio express :

Né en 1944 à Mostaganem, Réda Hamiani est titulaire d’une licence en sciences économiques et politiques, d’un diplôme de l’Institut d’administration des entreprises et de celui des Etudes supérieures en économie. Il a été successivement président de la Confédération algérienne du patronat (CAP), ministre délégué puis ministre de la PME/PMI. Depuis 2000, il préside le Forum des chefs d’entreprises.

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