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Réseau des Démocrates

GÉNÉRALE AU TNA DE “FAWDHA” D’AHMED LAGGOUNE

Liberté Culture (Jeudi 07 Octobre 2010)

 

Une belle audace !
Par : Sara Kharfi
fawdha.jpg

 

La dernière production du Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi a été représentée avant-hier soir à la grande salle Mustapha-Kateb, devant un public attentif et en grand nombre.

 

Mise en scène par Ahmed Laggoune, adaptée d’après une œuvre du dramaturge syrien, Abdemouneïm Amayri, Fawdha  s’intéresse à la femme dans une société conservatrice et injuste parce qu’elle l’exclut et la rejette.
Un contexte social qui n’admet pas les faiblesses humaines de la femme, qui jette la première pierre à la femme qui a péché, qui détruit parfois au lieu de construire et de prendre en charge. Fawdha, c’est l’histoire de quatre femmes qui évoluent dans le même espace (une maison), qui ont chacune une histoire particulière, avec des problèmes spécifiques à chacune d’entre elles ; mais ces déboires se confondent pour nous renvoyer au drame de la femme dans une société pleine de tabous, terrassée par les non-dits.
Les quatre femmes de Fawdha ont fui leurs villages pour s’installer dans la grande ville, là où elles pourront se fondre dans la masse et où elles pourront bien cacher leurs peurs, craintes et hontes. Le premier personnage, incarnée par l’excellente Nadia Talbi, est une femme qui a perdu son fiancé à la veille de leurs noces, parce qu’il avait tué un homme pour sauver son honneur, mais la famille de la victime s’est vengée. Elle se cache dans une maison dans la capitale qu’elle loue à des jeunes femmes seules. Ainsi, elle a un peu de compagnie. Ironie du sort, cette dame a peur de la solitude alors qu’elle semble l’avoir choisie.
Le deuxième personnage, incarné par Samia Méziane, est une jeune fille qui cherche désespérément son père auprès des autres hommes. Inexpérimentée, elle a une peur bleue de la vie et croit, inconsciemment, que si elle trouve le bonheur auprès d’un homme qui ne ressemble pas à son père, c’est comme si elle le tuait une deuxième fois. La troisième femme, incarnée par Adila Bendimerad, a été abandonnée par son amoureux lorsqu’il a appris sa grossesse.


Pour sauver sa vie, elle décide de fuir son village. Le dernier personnage, incarné par la talentueuse Mounira Roubhi Fissa, est une jeune femme chauve, qui a dû quitter les siens car ils voulaient la marier à un homme plus âgé que son père. Dans des apartés, ces femmes racontent leur drame mais ne semblent pas déterminées à changer leur condition.


Elles ont des habitudes et des gestes qu’elles répètent jusqu’à l’usure. Elles acceptent leur sort et même si elles rêvent parfois, elles gardent la tête sur les épaules, ayant ainsi une conscience de l’irréversibilité de leurs situations.
Par ailleurs, Nadia Talbi a signé un retour magistral avec cette pièce, Mounira Roubhi Fissa a été, comme d’habitude, très impliquée dans son rôle, Samia Méziane était juste et Adila Bendimerad a montré une autre facette de sa personnalité avec le rôle qu’elle a incarné. Le texte est d’une grande ouverture, très réaliste, avec un brin d’amertume, tout de même.
Ce qui est également intéressant est que Fawdha est dépourvue de tout esprit moraliste. Le regard du metteur en scène est audacieux et parfois cru, ce qui n’est pas pour nous déplaire !
Il use de certains procédés de distanciation, ce qui permet au spectateur d’apporter sa contribution au propos. En outre, la pièce est composée de monologues, donc il n’y a pas de réel échange entre les comédiens.
Mais le metteur en scène a réussi à créer une certaine complicité sur scène à travers l’introduction, entre autres, de la parodie (rituel de sorcellerie), ou en empruntant à d’autres genres comme le mimodrame (danseuses de boîte à musique). Le fait de jouer avec le temps, en découpant les tirades a permis une sorte d’éclatement, mais c’était toujours ordonné.
Les comédiennes ont trouvé une complicité entre elles et ont été d’une grande crédibilité dans le jeu. Et pourtant, ce n’était qu’une générale !


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