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Espace conçu pour les Démocrates de tous bords.

Réseau des Démocrates

DEBATTRE DE L’ECOLE

Par Salah CHOUAKI

 

 

Il nous a quitté, victime de la barbarie terroriste, mais ses idées vivent encore parmi ceux et celles qui se souviennent de lui. Il a laissé à tous les militants et militantes de L’Association Nationale de Défense des Droits de l’Enfant (ANADDE), ce texte qui devait introduire, en 1993, le débat sur l’école, et la nécessité de la réformer au plus vite, lors de notre troisième colloque sur le système éducatif.

Merci à toi Salah, nous n’oublions pas.

 

Pourquoi un tel débat?

 

N’y a-t-il pas risque de division de l’opinion publique, de la société et du corps enseignant?

S’il s’agit en effet d’exclusions, et de rejets mutuels, débattre est inutile. Mais si parents d’élèves, enseignants, chercheurs et cadres peuvent exprimer des points de vue en soulignant les nuances et les différences, pourquoi pas?

Si nous sommes convaincus que la vérité ne jaillit jamais du cerveau d’un seul, mais de l’horizon de tous, dans une mise en perspective, une convergence de points de vue et de conceptions qui naissent, au départ, épars, multiples et divers?

C’est même la condition essentielle pour faire émerger la vérité et les solutions dont elle est grosse; la vérité, quand elle aura été construite par tous, sera partagée; un long cheminement à faire ensemble, une libération des consciences, enfermées jusque là dans des points de vue réducteurs que, par facilité, on proclame définitifs; libération d’énergies qui s’émancipent en se dégageant des a-priori.

Pourquoi une Réforme?

Plusieurs réponses à cette question:

·                Donner une éducation à nos enfants pour les préparer à leur vie, à la vie.

·                En faire des citoyens, des hommes et des femmes, instruits, conscients et responsables.

·                Enraciner science et rationalité dans les esprits et la culture de notre pays.

Toutes les réponses, en fait, ne sont que l’expression d’une conviction largement partagée ; nos enfants, c’est à dire l’Algérie, ont un avenir. Ils ont des potentialités que l’école doit aider à faire émerger et à se déployer.

En tout cas, une réforme, ce n’est ni une mesure administrative, ni un dossier que l’on ouvre et que l’on referme. C’est un processus ininterrompu à mettre en branle, avec ses avancées mais aussi ses malentendus à lever; y aurait-il débat si nous étions d’accord sur tout? Les voies nouvelles ne s’ouvrent qu’à ceux qui font preuve « d’ijtihad ».

 

Une réforme?

C’est donc en deçà et au delà de mesures qui peuvent être prises nécessairement : c’est la réalité de l’éducation dans notre pays, à évaluer, des processus décisionnels à mettre en œuvre en marche pour donner lieu à d’autres processus longs et complexes. Si des mesures sont prises et des textes promulgués c’est pour ponctuer cette marche et ménager l’avenir et non l’emprisonner dans l’espace exigu d’une gestion tatillonne.

Car une réforme c’est l’expression de toute une société maintenue en éveil, l’expression d’une volonté collective de changer les choses pour durer, d’innover, de se rénover pour être soi. Refuser de changer, stagner, c’est donc refuser de durer, d’être soi, c’est s’aliéner, au sens propre du terme, ne plus s’appartenir.

 

Rupture dites-vous?

Si refuser de changer c’est se condamner à disparaître, c’est rompre définitivement avec soi-même, c’est un acte suicidaire, personne ne peut raisonnablement de cela.

Mais tout le monde certainement veut rompre avec des comportements, une routine, des conceptions dépassées, des méthodes de travail et de gestion qui bloquent, des idées toutes faites qui ne correspondent plus à la réalité.

Tous ici veulent:

·                Réhabiliter l’enfance comme sujet actif de l’action éducative, somme de virtualités et non plus réceptacle d’un savoir tout fait.

·                Réhabiliter le savoir comme action de l’être humain pour explorer et maîtriser le réel.

·                Réhabiliter la rationalité, c’est-à-dire des manières de penser et d’agir sur le réel en nous émancipant des conceptions réductrices.

Rupture:

c’est rénover, innover en cherchant, en se cherchant, pour se réaliser pleinement, être soi.

Des réponses?

A quelles questions? Qui les posera? Une recherche de justes réponses passe nécessairement par des questions clairement formulées, c’est-à-dire l’expression de besoins sociaux, d’une demande sociale, qu’en tant que simple citoyen, non spécialiste de l’éducation, simplement, j’exprimerai de manière non élaborée. Aux gens du terrain, pédagogues, enseignants, sociologues, psychologues à élaborer l’expression de cette demande.

Qu’est-ce que la recherche pédagogique?

Ce n’est ni un appareil administratif, ni une communauté de scientifiques et de techniciens, fermée sur elle même: elle a besoin, à un moment, d’être déverrouillée pour prendre en compte les besoins que la société exprime de toute façon, capter les énergies intellectuelles de nos enseignants et de nos chercheurs, proposer aux institutions du pays de nouvelles formes d’organisation, sensibiliser les parents et les enfants sur la nécessité de s’impliquer en toute connaissance de cause  dans les changements qui interviennent.

Ouverte à tous, à des niveaux différents, selon des formes différentes, une recherche pédagogique, ce sont des fenêtres de l’école, ouverte sur l’extérieur 

Ce sont des murs aveugles qu’on abat, des a-priori qui tombent, l’expression démocratique d’une société qui veut changer son école.

L’évaluation

Le premier acte de la recherche pédagogique c’est l’évaluation de l’état actuel du système éducatif.

Les techniciens ont tendance à user et abuser de la quantification en matière d’éducation; pourcentages, taux de passage, d’échecs et de réussite, nombre d’heures, d’années, etc. Et la qualité? Ne peut-on réhabiliter des formes d’évaluation qualitative? Une évaluation des performances au plan qualitatif des enfants actuels ainsi que la qualité de la gestion et de l’action pédagogique?

La qualité de la formation des enseignants et de ceux qui les forment ou les encadrent? La qualité de l’éducation que le 21° siècle, l’économie de marché et la société future actuellement en état de gestation?

Évaluer c’est comme gouverner. C’est prévoir à partir du diagnostic objectif d’un état réel.

Par exemple qu’est-ce que l’option scientifique? Comment est-elle appliquée? Augmenter les horaires ne suffit pas, tout le monde est d’accord. Est-ce spécialiser ou préparer à des champs de spécialisation? à la mobilité?

On peut se poser la question suivante: ne s’est-on pas abrité derrière le slogan d’option scientifique pour fuir les exigence de la rationalité? L’option scientifique est plus une réponse aux exigence de la rationalité qu’une suite de contenus et d’enseignements neutres et ...incommunicables sans rationalité..

L’enseignement des sciences sociales, de la langue et de la littérature n’entre- t- il pas dans l’option scientifique? C’était pour proposer un axe d’évaluation du système éducatif.

En fait, évaluer le système éducatif, c’est le mesurer à l’aune d’une école algérienne moderne, projetée comme perspective d’avenir; une école qui réconcilie les algériens avec eux mêmes, avec les valeurs d’universalité et d’humanisme.

Une école qui se construira avec la participation de tous: pluraliste donc de sens, on y apprendra à s’accepter pour édifier un avenir commun.

Une école qui nous réconciliera avec la science comme quelque chose que l’on s’approprie par le travail et la réflexion personnelle.

Une école algérienne moderne c’est une vision prospective de ce que sera l’Algérie dans 15, 20 ou 30 ans…               

                                                                                              SALAH CHOUAKI

 

 

 

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