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Réseau des Démocrates

De Rabat à Tunis, les femmes en lutte contre préjugés et intégrismes

20110115

La Tunisie a voté et porté les islamistes au pouvoir. Les femmes tout autant que les jeunes internautes ont crié au hold up, en oubliant la nature conservatrice de leur société et la lutte sans merci que Benali a mené aux islamistes. Avec leur victoire aux élections, les islamistes ont immédiatement pensé que tout leur était permis. Leur première cible : les femmes, comme pour se venger de Leila Benali et de son odieuse famille.


Les révolutions fonctionnent toujours à la vengeance et ce sont fréquemment les maillons faibles qui, visés en premier lieu, paient l’ardoise. Et les islamistes d’Enahdha, ou d’ailleurs, ont d’abord commencé par agresser les femmes, probablement pour leur faire expier leur virulence durant la campagne électorale.

Face à cette agression, plus ou moins « annoncée », plus ou moins attendue, comment réagir dans la durée et non de manière conjoncturelle oui circonstancielle?

L’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) à partir d’atteintes illégitimes à la liberté, à la dignité et à l’égalité dénonce la montée d’une autre forme de dictature politique et de tyrannie sociale. Dans cette perspective, il est dit dans le communiqué du 3 novembre 2011 :

« Nous appelons toutes les composantes de la société civile à sensibiliser l'opinion publique à la vigilance, à l'engagement à la défense des institutions éducatives, loin de toutes les récupérations partisanes et religieuses, à leurs protections contre les troubles et à obliger toutes les parties à des règles de comportements civiles et civilisés. »

 

L’appel est juste, tant dans son contenu que pour les composantes de la société civile auxquelles il s’adresse. Mais un appel est-ce suffisant face à des menaces dont nous venons de  vivre les prémisses? Des menaces appelées à se répéter si les réactions sont molles ou de nature politiciennes. Si la politique envers les femmes et leurs droits n’est pas réaffirmée et inscrite noir sur blanc sur ce contrat social fondamental qu’est la Constitution.

Beaucoup de militants ont constaté que les appels font désormais partie de la panoplie des formes de lutte archi-connues et utilisées jusqu’à la corde. Ils pensent, qu’à l’heure où tout le monde réclame des changements, il conviendrait, désormais, de s’interroger sur la pertinence du renouvellement des formes de lutte, en fonction tant des mutations sociales, politiques que culturelles intervenues, depuis la Révolution. Rien n’est donné de manière intangible ; tout bouge, évolue, change et bouscule tous les dogmatismes qui ont mené nos pays à l’immobilisme et à la sidération ayant servi de terreau à toutes les dictatures.

Moncef Marzouki dans son dernier interview à Mediapart offre une nouvelle forme dans le contexte actuel ; même si, par le passé, elle a déjà été utilisée. Il s’agit des Etats généraux, ayant pour principale fonction de débattre et de définir des politiques dans les domaines les plus importants de l’activité nationale : éducation, santé, emploi des jeunes, économie, société et justice.

Les problèmes de la femme en Tunisie ou, de manière plus générale au Maghreb, font partie de ce que l’on peut appeler les questions socles. Autrement dit, sur la base desquelles toute une société s’édifie, se développe et s’épanouit en respectant les principes d’égalité hommes/femmes et de justice sociale. Une société de citoyennes et de citoyens plaçant l’intérêt général au dessus de toutes autres considérations. C’est le propre de toute révolution de rompre avec l’idéologie des dictateurs et de remettre les choses sur leurs véritables bases : donner les moyens au peuple d’exercer sa souveraineté, toute sa souveraineté, si frauduleusement kidnappée depuis nos indépendances. Ce dont les dictateurs l’ont privé.

Par ailleurs, mais toujours en ce qui concerne les formes de lutte, Moncef Marzouki. Considérant la cécité des intellectuels français qui ne saisissent les réalités sociales, idéologiques et politiques des pays arabes et maghrébins qu’au travers de leurs grilles de lecture, il développe dans la même interview accordée à Mediapart, l’idée de rencontre entre démocrates et islamistes et de l’osmose. Il énonce une vérité à laquelle les uns et les autres, prisonniers de dogmes et de clivages outranciers, ont délibérément tourné le dos ; croyant que leur vérité était la vérité de tous, ou mieux la vérité devant s’imposer à tous.

Il parle alors de l’osmose et de ses effets.


"L’osmose, c'est-à-dire la dynamique qui a fait que dans les années 1970 et 1980, les deux groupes, les laïcs de gauche nationalistes et les islamistes, se sont pour partie rapprochés.

Des laïcs se sont rapprochés de l'islam, sans pour autant abandonner leurs conceptions de la politique, et des islamistes se sont littéralement convertis à la démocratie et aux droits de l'homme. Cette osmose est complètement méconnue par les Français, qui en sont restés à des schémas stéréotypés, ce qui les a empêchés de comprendre et de prévoir les révolutions arabes."

 

Je trouve qu’il est grand temps de réexaminer avec le maximum d’objectivité et le minimum d’apriori et de préalables idéologiques et politiques, cette relation entre démocrates et islamistes ; un rapport plus que déterminant pour l’avenir des peuples du Maghreb et leur équilibre.

Comme il est non moins fondamental de revisiter la question socle des femmes et de leurs droits, en organisant des Etats généraux de la femme, ouverts à toutes les tendances et sensibilités politiques, et à tous les niveaux. Le débat ne doit pas se limiter aux grands centres urbains mais toucher toutes les couches sociales, là où elles se trouvent, afin que, comme l’a souligné Marzouki, se réalise une appropriation par le peuple de tous les aspects de la vie sociale dont la Constitution sera la traduction. Et pourquoi pas, dans la foulée, des Etats Généraux de la femme Maghrébine ?

 

par Si Mohamed Baghdadi

le 09.11.2011

 

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