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12 Octobre 2015
PHOTOGRAPHE : EXTRAITS DU LIVRE « VIE ? OU THÉÂTRE » SÉLECTIONNÉS PAR DOMINIQUE CONIL ET SOPHIE DUFAU
Le destin tragique de Charlotte Salomon a presque fini par occulter son œuvre, en dépit de nombreuses expositions dans le monde entier. Vie ? ou théâtre ?, gigantesque récit d’apprentissage en 781 gouaches et des centaines de calques manuscrits, n’avait jamais été montré dans son intégralité. Les éditions du Tripode donnent pour la première fois cet « opéra bouffe » (ainsi qu'elle qualifiait son œuvre), que l’on peut voir et lire dans toute sa cohérence. Magistral, flamboyant défi aux ennemis de l’« art dégénéré » et roman graphique avant l’heure.
Extrait du livre Vie ? ou théâtre ?
Dans les photos suivantes, nous avons choisi de vous présenter les pages du livre (avec repères d'impression) et non seulement les dessins de Charlotte Salomon, afin de mettre en valeur son travail et sa restitution par l'imprimeur. Plus d'un tiers des gouaches étaient accompagnées d'un calque sur lequel Charlotte Salomon avait écrit les scènes et dialogues. Ces textes sont traduits dans la marge de la page et pour leur lisibilité, nous les avons reproduits en légende de chaque photo. Le titre en gras est de la rédaction de Mediapart, il est destiné à replacer les dessins dans le récit d'une vie.
Le suicide de sa mère, Franziska. Ci-dessous, le texte du calque accompagnant la gouache :
« Voici ce qu'elle pensait : »
Mélodie. Mon mari, il ne m'aime pas. Mon enfant, il n'a pas besoin de moi. Pourquoi, pourquoi donc vivre ?
Berlin et le café interdit aux Juifs.
CHARLOTTE : Est-ce qu'il est encore là-haut ?
Non, je n'y pense même pas, je ne l'attends pas.
Je vais aller dans un café.
Mais voilà, c'est partout marqué :
« Ici l'entrée est interdite aux Juifs. »
J'y vais quand même.
Ça ne saute pas aux yeux que je suis juive.
Je ne sais où aller sinon.
En tout cas, il m'est impossible de remonter.
Dîner des juifs de Berlin sur le point de s’exiler.
CHAPITRE 4. LES JUIFS ALLEMANDS.
Chacun d'eux est si préoccupé par sa situation personnelle qu'ils donnent à un observateur silencieux, lorsqu'ils sont réunis lors d'un dîner, l'impression d'une basse-cour.
ALBERT : Je commence par faire partir ma fille.
FEMME À DROITE D'ALBERT : Nous partons pour l'Australie !
HOMME ENTRE LA FEMME ET CHARLOTTE : Que faites-vous ?
SCULPTEUR : Je pars pour les États-Unis, pour y devenir le plus grand sculpteur du monde.
PAULINKA : Nous restons provisoirement ici.
MONSIEUR BLAHN : Je pars pour les États-Unis, pour y devenir le plus grand chanteur du monde.