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4 Février 2010
Le développement d’une économie de services
Le potentiel économique majeur de l’Algérie aujourd’hui se trouve dans les services du fait des changements de mode de vie (urbanisation, vieillissement de la population, nouveaux modèles de consommation et aspirations des individus), de la proximité avec l’Europe, des besoins en services de soutien de nos entreprises et du formidable potentiel inexploité de nos universités.
Le potentiel des services est à développer à la fois en terme de contribution au PIB mais surtout en termes de création d’emplois.
L’approche consistera à développer tous azimuts les différents types de services pour assurer un haut niveau de tous les secteurs. En parallèle, l’Algérie développera des avantages concurrentiels spécifiques dans quelques domaines, en prenant exemple sur les succès de l’Inde, des pays d’Europe de l’Est ou du Brésil.
Les segments où des avantages compétitifs durables seront créés auront les caractéristiques suivantes :
Les services aux entreprises
L’Algérie deviendra un gros producteur de services aux entreprises en misant sur des entreprises spécialisées multiservices de qualité et très professionnelles. Des plates-formes seront créées à proximité des universités dans les deux domaines suivants :
Pour y parvenir, l’Etat a un grand rôle à jouer en facilitant la mise en place d’entreprises nationales en partenariat avec des entreprises indiennes ou européennes afin de proposer des services de qualité et bon marché, en mettant en place une législation favorable au recours à ces services par les entreprises algériennes (ce qui permettra à la fois d’améliorer le niveau de prestation de service pour ces entreprises et d’alimenter une demande importante), en encourageant fortement les jeunes diplômés à faire une carrière dans ces secteurs en début de carrière, notamment pour renforcer leur CV par une exposition à de la prestation de services de niveau international (comptabilité – audit, engineering, informaticiens, ressources humaines).
L’industrie du savoir
L’Algérie doit également prendre sa place dans l’industrie du savoir, notamment dans des segments encore relativement peu concurrentiels et des niches adaptées à la situation de notre pays (traduction de livres en arabe, littérature enfantine, livres électroniques, services de numérisation et de bases de données). Là encore, la collaboration avec des entreprises de pays comme le Liban pour la traduction arabe – français - anglais, le Royaume-Uni, l’Espagne ou la France est indispensable.
La gestion immobilière
Le secteur de la gestion immobilière représente un potentiel très important. Il se développera grâce à une restructuration de la chaine de l’immobilier qui définira les différents rôles que peuvent jouer des entreprises ainsi que leurs obligations légales :
Des sociétés spécialisées dans le property management seront chargées de l’entretien des infrastructures et des bâtiments et devront être dotes des expertises, systèmes, modèle de coût et de gestion des actifs et moyens d’intervention matériels indispensables à leur bon fonctionnement
Tous ces métiers de la gestion immobilière et de la construction verront la mise en place de formations universitaires modernes et de haut niveau et la collaboration entre sociétés algériennes et sociétés étrangères afin de bénéficier de l’expertise des sociétés anglo-saxonnes notamment.
Une régulation sévère sera également mise en place pour encadrer les ventes hors plan, protéger les consommateurs des intermédiaires et constructeurs véreux, favoriser un financement bancaire sain du marché de l’immobilier résidentiel, touristique ou commercial par le biais de limites strictes au leverage bancaire (plafond de l’ordre de 70% de la valeur du bien pour le financement bancaire), le versement des échéances en fonction de l’avancement de la construction (escrow accounts) et la mise en place d’un marché des Mortgage Backed Securities afin d’assurer un refinancement des banques sur le marché secondaire et l’ouverture du financement de l’immobilier à des fonds d’investissements spécialisés, algériens et étrangers.
En structurant le secteur, l’Etat assurera les conditions de retour sur investissement pour tous les acteurs (constructeurs et acquéreurs) par le biais d’une politique de prix incitative et équilibrée, en rompant avec la politique d’appels d’offres aux prix inferieurs aux coûts, dangereux à terme pour la qualité et la sécurité des immeubles et des ouvrages.
Les services aux personnes
Un potentiel important en matière d’emplois et d’amélioration de la qualité de vie se trouve dans les services aux personnes. Dans ce domaine, l’Etat a un grand rôle à jouer afin de structurer le secteur : il s’agit de rendre solvable la demande (incitations fiscales), de créer un réseau d’entreprises, de coopératives, de crèches et d’associations efficaces (utilisation de portails Internet, soutien à la formation professionnelle permanente, accès aux financements bancaires, subventions des collectivités territoriales) et de protection des travailleurs (salaire décent, protection sociale, formation professionnelle et académique en parallèle de leur travail pour leur assurer une promotion sociale, plans personnalisés ou collectifs d’épargne, logements sociaux pour favoriser la mobilité géographique).
Des programmes spécifiques seront mis en place avec les ministères concernés pour favoriser les métiers de gardes d’enfants, de femmes de ménage pour les foyers dont les femmes travaillent, d’infirmiers à domicile, de personnels dans les crèches, notamment dans les grandes entreprises.
L’éducation (les réformes éducatives seront développées dans un prochain thème principal de débat)
L’Algérie doit devenir une puissance régionale dans le domaine de l’éducation c’est-a-dire également faire en sorte que le secteur, au-delà de sa mission de service public, joue un rôle important dans l’économie marchande du pays.
Pour cela, deux grands objectifs économiques sont fixés au secteur:
Outre les écoles, centres de formation professionnelle et universités publiques qui joueront un rôle clé dans cette stratégie, des groupes privés seront mis en place pour développer leurs activités en bénéficiant de facilités s’ils répondent aux normes de contrôle et de régulation fixées par l’Etat.
Si ce pari de la qualité est tenu, l’éducation peut devenir un secteur majeur du pays en matière de création de richesses, d’emplois et d’exportation de services.
La santé (les réformes de la santé seront développées dans un prochain thème central de débat)
De même, l’Algérie a les moyens de devenir une puissance régionale dans le secteur de la santé.
De manière similaire à l’éducation, deux grands objectifs seront fixés:
Des investissements importants du secteur privé seront sollicités mais encadrés par la régulation publique, notamment en termes de coûts et de qualité. La santé, plus encore que l’éducation, deviendra un secteur fortement exportateur de services.
Les arts et l’artisanat (la réforme de la politique culturelle et du tourisme seront développées dans un prochain thème de débat)
L’Algérie a les moyens de développer le secteur des arts et de l’artisanat notamment à travers l’extraordinaire patrimoine gastronomique, architectural, en bijoux, vêtements, en objets de décoration que nous possédons dans nos villes et nos musées. Ce secteur deviendra un important pourvoyeur de revenus et valeur-ajoutée et d’emplois pour le pays.
La stratégie économique dans ce domaine comporte cinq volets :
La mode et la création dans le secteur du luxe
Dans un secteur aux marges très élevées et encore relativement peu concurrentiel, l’Algérie créera une industrie tirée par quelques stylistes, créateurs et entreprises de luxe dans les dix prochaines années.
Pour cela, il faudra réunir trois éléments :
Les medias, la production audiovisuelle et cinématographique et la publicité
Avec la libéralisation des medias, une véritable industrie des medias pourra être créée.
La structuration sera cruciale pour permettre aux medias de prospérer et de rester indépendants et neutres des pouvoirs économiques, politiques ou des puissances étrangères en remplissant leur devoir vis-à-vis de la collectivité en matière d’éducation et d’information. Une organisation sera dégagée autour des principes suivants :
Dans le domaine de la publicité, un potentiel important existe afin de réduire la dépendance de la production étrangère. Avec le talent polyglotte, l’ouverture sur le monde et l’humour de beaucoup d’Algériens, la publicité est promise à un bel avenir à condition de structurer le secteur. Cette structuration se fera d’abord dans le secteur de la formation ou des formations spécialisées seront mises en place afin de faire émerger des professionnels talentueux et maitrisant les techniques de ces métiers. Les Algériens ayant fait leur preuve à l’étranger seront également encouragés à fonder leurs entreprises en Algérie ou à rejoindre les futurs groupes nationaux. Ensuite, des sociétés seront créées et encourager à se développer afin d’atteindre une taille critique nationale, voire régionale et être capables de gérer des budgets importants dans différents medias. La commande publique et des entreprises nationales viendront en relais pour créer une demande suffisante pour tirer ces sociétés vers une taille critique. Enfin, le développement à l’international (monde arabe, Afrique, Europe) sera encouragé en collaboration avec les professionnels du secteur.
L’industrie des loisirs et du sport (les réformes dans le domaine sportif seront présentées dans une autre contribution)
Avec sa population jeune et l’importance de la famille, l’Algérie dispose d’un grand potentiel dans le secteur des loisirs et du sport. Pour cela, il faut combiner une action publique forte en terme d’accès au sport de masse et de gestion des sites culturels, et l’émergence d’entreprises composées de professionnels pour gérer des installations sportives (salles de sport, pistes de ski, sports nautiques) ou des sites de loisirs (parcs d’attraction, complexes cinématographiques, jeux d’arcade). A nouveau, l’Etat à tous les niveaux (administration centrale, collectivités territoriales) déploiera une politique cohérente pour favoriser l’émergence de cette industrie : formations, partenariat international pour faire venir des entreprises qualifiées au niveau international, notamment pour les parcs à thème, financement et incitation économique et protection de la propriété intellectuelle.
Le commerce et la distribution
L’Algérie a une tradition commerciale très ancienne, que ce soit dans le désert ou les villes. Avec un effort marginal, elle peut devenir un pole important du commerce.
Trois axes peuvent être développés :
La restructuration du commerce intérieur
Le commerce informel et la contrefaçon doivent être réduits, notamment l’écoulement de marchandises de piètre qualité voire dangereuses pour la sécurité et la santé sur son territoire. Sa part passera de 35% du PIB à moins de 10% du PIB hors hydrocarbures.
Pour cela, une véritable stratégie mêlant mesures incitatives et répressives sera mise en place:
La répression des fraudes au commerce sera renforcée et des brigades conjointes seront créées entre la douane, les impôts, les banques et la Direction des prix et de la répression des fraudes. Des sanctions sévères seront prononcées, comme la suspension de la possibilité d’exercer comme commerçant en cas de ventes sans licence ou sans facture, des peines de prison et des amendes très lourdes en cas de vente de produits contrefaits, la prison à vie en cas de ventes de produits contrefaits dangereux pour la vie humaine (médicaments, pièces détachées)
Un effort considérable de mise aux normes de la législation et des produits commercialises (transposition de standards internationaux) sera conduit après avoir transformé le fonctionnement du commerce sur le terrain. Des initiatives conjointes avec les chambres de commerce et les associations de commerçants viseront à faire adhérer tous les commerçants à des labels de qualité, de sûreté et de protection de l’environnement.
Une fois ce travail d’assainissement conduit, la réorganisation du commerce sera articulée autour des mesures suivantes :
Ces nouvelles formes de commerce supposent que de nouveaux entrepreneurs algériens, bien formés, créent des sociétés de taille importantes dans le pays, seuls, en tant que franchiseurs ou en partenariat avec des enseignes étrangères renommées.
Les franchises devront être également régulées selon les trois formes d’organisation suivantes:
Les franchises devront être exploitées rapidement sous peine de perdre leur exclusivité afin d’éviter les phénomènes actuels de préemption parasitaire de marques.
La restructuration du commerce extérieur et la mise en place d’un hub logistique dans l’import reexport
Le second axe de développement consiste à faire jouer à l’Algérie un rôle important en matière de flux de commerce internationaux.
Pour les besoins du commerce extérieur, l’Etat réorganisera complètement la chaine et ses processus (douanes – banques – impôts – transporteurs – agents – laboratoires de contrôle – sociétés de manutention) afin de faire de l’Algérie un espace intégré au niveau mondial.
Par ailleurs, l’Algérie deviendra une des meilleures plateformes logistiques de la Méditerranée, véritable hub dans l’import - reexport:
Le commerce électronique sera développé (en parallèle du secteur des télécommunications).
De nouveau, le rôle de l’Etat est crucial
L’hôtellerie et la restauration (réformes de la politique touristique abordées dans une autre contribution)
L’Algérie comblera son retard en matière d’infrastructures hôtelières en mettant en place les cinq éléments suivants :
une véritable politique de développement touristique intérieur et étranger dans le pays avec trois fers de lance (un tourisme culturel dans les grandes villes et les sites archéologiques, le tourisme saharien et le tourisme balnéaire dont il faut néanmoins contrôler le développement) et un positionnement clair (d’abord dans le haut de gamme pour obtenir son insertion dans la vie de la cité, puis dans tous les segments de marché)
une refonte du contrôle et de la régulation des hôtels : définition et classement par catégories, respect des normes pour agréer les projets, durant la construction et les règles opératoires, le développement d’une capacité d’agrément de projets hôteliers de qualité, respectueux de la personnalité, de l’histoire de chaque région, ainsi que de ses caractéristiques environnementales (ainsi, il serait incongru de bâtir de grandes tours de verre dans le désert), le développement de véritables complexes de taille raisonnable avec une personnalité propre, une régulation de l’offre pour éviter les surcapacités
la mise en place de chaines d’hôtellerie algérienne et l’installation de chaines hôtelières internationales en investissements propres ou en partenariats avec des groupes algériens
la bonne collaboration avec les autres services (loisirs, agences de voyage, transport aérien et routier, restauration, guides, musées, police)
la formation massive à tous les métiers de l’hôtellerie en collaboration avec
des Etats renommés dans ce domaine (Singapour, Suisse, France, États-Unis)
Les transports et la logistique
Le secteur des transports sera restructuré pour jouer son rôle économique et social et favoriser l’émergence de sociétés solides et profitables.
Les objectifs à poursuivre sont les suivants :