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JÉRUSALEM Unie mais partagée

Un spécialiste israélien des négociations israélo-arabes propose un plan de paix pour la Ville sainte.
La vieille ville de Jérusalem, le 13 décembre 2013. - AFP / Ahmad Gharabli  
La vieille ville de Jérusalem, le 13 décembre 2013. - AFP / Ahmad Gharabli

 

Il paraît fort peu probable que l’on parvienne à un accord dans les négociations de paix israélo-palestiniennes, car ni le Premier ministre israélien Nétanyahou ni le président Abbas ne sont en position d’accorder les concessions nécessaires pour parvenir à la paix tout en assurant leur survie politique. Cela dit, l’avenir de Jérusalem pourrait déterminer la réussite ou l’échec de l’éventuel accord. C’est pourquoi il est urgent d’engager des discussions publiques au sujet de l’avenir de Jérusalem car Israéliens et Palestiniens doivent se préparer à accepter l’inévitable – une Jérusalem unie, mais en même temps capitale de deux Etats.

Du point de vue de nombreux Israéliens, il est inconcevable de confier la moindre partie de Jérusalem à la juridiction d’autres peuples ou à un organisme international de gestion. Cet attachement et cette affinité uniques à la Ville sainte, qui symbolise depuis des millénaires le sentiment juif de la rédemption, ont constitué une puissante motivation pour s’emparer de la ville lorsqu’elle s’est trouvée à portée de main de Tsahal à l’issue de la guerre des Six-Jours de 1967. La chute de Jérusalem est ainsi devenue un événement sans précédent qui en est venu à symboliser l’absolution juive. La réalisation de ce que l’on considérait jusqu’alors comme un rêve inaccessible était à présent considérée comme l’œuvre du Tout-Puissant, qu’aucune force ne saurait arrêter.

En raison des convictions religieuses liées aux troisièmes lieux les plus sacrés de l’islam – la mosquée Al-Aqsa et le Dôme du Rocher –, les Palestiniens n’accepteront aucun compromis ne prévoyant pas que Jérusalem devienne la capitale de leur futur Etat. Les musulmans du monde entier croient que Mahomet a effectué le trajet de La Mecque à Masjid Al-Aqsa à Jérusalem avant de monter au paradis.

Les réalités religieuses, démographiques, physiques, psychologiques et politiques auxquelles sont aujourd’hui confrontés Israéliens et Palestiniens à Jérusalem exigent que celle-ci devienne une ville unie – mais partagée – incarnant la coexistence israélo-palestinienne. Ni Israël ni les Palestiniens ne peuvent éliminer la présence de l’autre dans la ville. Jérusalem représente non seulement la plus forte concentration urbaine où Israéliens et Palestiniens cohabitent, mais aussi l’épicentre même du conflit qui les oppose.

La réalité démographique dans les parties est et ouest de Jérusalem rend impossible une division de la ville. Si les habitants palestiniens sont en grande majorité regroupés à Jérusalem-Est, plus de 40 % des habitants de Jérusalem-Est sont aujourd’hui des Juifs vivant à l’est de la Ligne verte qui divisait autrefois la ville avant la guerre de 1967.

En sus de ce mélange démographique, Israël, qui a annexé la ville dès la fin de la guerre de 1967, a développé les parties est et ouest de la ville comme s’il s’agissait d’une ville unique, avec un seul réseau de routes, de transports en commun et d’infrastructures telles que les conduites de gaz ou l’électricité. Israël a compris que ces liens structurels rendraient impossible toute future division.

Considérer que le conflit à propos de Jérusalem n’est qu’un conflit entre religieux reviendrait à ignorer les liens psychologiques et émotionnels communs qu’éprouvent Israéliens et Palestiniens à l’égard d’une ville qu’ils considèrent au cœur de leurs aspirations nationales respectives. Les Israéliens soutiendront l’expulsion de certains colons de communautés situées en dehors des principales colonies de Cisjordanie mais n’approuveront jamais l’expulsion des Israéliens des environs de Jérusalem. De la même façon, les dirigeants palestiniens ne renonceront jamais à revendiquer Jérusalem-Est comme capitale de leur Etat. Cette situation exige que l’on envisage une approche qui permette de mettre fin au conflit en partageant la souveraineté sur la ville.

Plusieurs des idées suivantes concernant l’avenir de la ville ont déjà été longuement discutées, mais ce qui a toujours manqué jusqu’ici, c’est un débat public concerté abordant les différents aspects d’un éventuel accord. Cela est particulièrement important du fait que les opinions tant israélienne que palestinienne doivent être préparées psychologiquement à accepter l’inévitable – une cité unie mais capitale de deux Etats – et disposées à appuyer leurs dirigeants afin qu’ils parviennent à un tel accord. Dans le même temps, les éléments radicaux des deux camps susceptibles de recourir à n’importe quel moyen (y compris la violence) pour saborder un tel accord doivent être désarmés.

Aucune frontière. Tout accord devra institutionnaliser la situation réelle sur le terrain. Vu l’entremêlement de la démographie et des infrastructures de la ville, on ne pourra changer que très peu de choses lors de la mise en place de deux capitales. Les quartiers juifs devront être placés sous souveraineté juive, les zones palestiniennes sous souveraineté palestinienne.

Les Lieux saints devront être administrés par des représentants des différentes confessions. Un statut spécial devra être établi d’un commun accord pour le mont des Oliviers et la Cité de David. Une force de sécurité commune devra être mise sur pied pour assurer la sécurité publique et l’intégrité des Lieux saints. Chaque partie administrera ses propres lieux saints et autorisera les visites mutuelles d’un commun accord.

Il ne devra y avoir aucune frontière ou barrière physique séparant Jérusalem-Ouest et Jérusalem-Est, et la circulation des biens et des personnes devra rester libre comme c’est le cas actuellement. La frontière entre les deux capitales sera uniquement une frontière politique destinée à délimiter les compétences municipales respectives.

Les Palestiniens qui se retrouveraient du côté israélien (hormis le cas où ils sont citoyens israéliens) jouiraient d’un droit de résidence permanent mais ne voteraient ni ne pourraient être élus que du côté palestinien ; de même, les Israéliens habitant une zone dépendant de la juridiction palestinienne de la ville auraient le statut de résidents permanents en Palestine et auraient le droit de voter et d’être élus dans les élections israéliennes.

Une nouvelle municipalité palestinienne serait établie pour gérer la partie orientale de la ville placée sous sa juridiction et une commission mixte représentant les deux municipalités serait chargée de résoudre les problèmes que la cohabitation pourrait créer d’un côté ou de l’autre. Chaque municipalité se doterait de ses propres forces de sécurité, mais des unités mixtes coopéreraient sur les problèmes de sécurité qui pourraient surgir afin d’enrayer toute violence d’un camp contre l’autre. Il est grand temps d’engager de tels efforts.

Alon Ben-Meir
Publié le 26 septembre 2013 dans The Huffington Post (extraits) New York

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