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Réseau des Démocrates

ICI MIEUX QUE LA-BAS Tabou kabyle

 

http://t3.gstatic.com/images?q=tbn:MojzN52hOgJnHM:http://www.cg58.fr/IMG/jpg/Arezki-Metref-W200.jpgPar Arezki Metref

arezkimetref@free.fr


Si une hirondelle ne fait pas le printemps, combien en faut-il pour le faire ? La météo n’est pas terrible- terrible et le printemps ne sera pas berbère, comme il y a trente ans. Trop de nuages dans le ciel pré-chaotique… Eh oui, c’est le trentième anniversaire du Printemps berbère, pour ceux qui ne sont pas ou qui se refusent à être au parfum...


Vous savez les manifestations de 1980… la conférence de Mouloud Mammeri annulée par le wali… Les étudiants qui manifestent et puis cette mobilisation de toute la ville de Tizi-Ouzou, s’étendant à la Kabylie avant de gagner Alger… Ça prend tellement d’ampleur que le pouvoir décide de résoudre le problème de la seule manière qu’il connaisse depuis toujours : en envoyant l’armée ! … Ce faisant, il perd sur toute la ligne… Coups de baïonnette, arrestations, Cour de sûreté de l’Etat, tout cela n’a pas empêché que la consubstantialité entre revendication culturaliste et exigences démocratiques fassent leur chemin de concert, et que, fécondées et relayées par d’autres luttes, elles s’imposent dans le débat algérien d’aujourd’hui. Rien ne vient de rien. Ce qui est triste, c’est que le pouvoir continue de péjorer et de minimiser l’apport des ces manifestations pacifiques au basculement du débat politique algérien dans la modernité. Qui osait parler, avant que ça ne se libère en s’épanouissant, précisément avec le Printemps berbère, de droits de l’homme, de liberté de la presse, etc. ?

 

Maintenant que c’est devenu banal, bien évidemment, tout le monde refait l’histoire en la resserrant bien dans sa petite lorgnette… Mais en ces temps-là, le « soutien à la direction révolutionnaire » était le credo et toute revendication qui contrariait la vision dogmatique des maîtres était forcément une de ces perfides menées de l’impérialisme… Ce qui est triste donc, ce n’est pas tant que le même pouvoir, perpétué par d’autres hommes reste enferré dans la même fixité d’idées mais qu’une sorte d’anti-berbérisme, bien que non formulé, fait appréhender, même parmi les intellectuels les plus… allez disons, les plus sympathiques, ce tournant de l’histoire algérienne comme une simple manifestation régionale lors de laquelle des Indiens supplièrent de pouvoir parler leur langue dans leur réserve… Erreur, ou pire, mauvaise foi…

 

Le Printemps berbère est la première grande manifestation populaire dans l’Algérie indépendante à exiger autre chose que du pain. C’est la première fois que la population proteste aussi massivement, en interpellant frontalement le pouvoir. Rien qu’à ce titre déjà, c’est à graver… Sans compter que si on écoutait attentivement le message des revendications, on s’apercevrait sans peine de leur caractère national et démocratique. Ce qu’elles revendiquaient? Parbleu ! Les libertés individuelles et démocratiques, combats des sociétés modernes, verrouillées à l’époque par l’unipartisme du FLN et aujourd’hui par un pluralisme de façade…


Rebelotte en 2001… L’Etat algérien, capturé par des clans, décide, après avoir obtenu grâce à des provocations avérées que la Kabylie se soulève, de faire la guerre à une partie du pays. Pour faire une guerre, il faut des armes de guerre, et on sait que les pandores ne s’en sont pas privés. Là aussi, c’est comme si la Kabylie se soulevait au nom de toute l’Algérie.

Il suffit de prendre en compte la fameuse plateforme d’El-Kseur pour mesurer la portée politique nationale de ce qu’exigeait le mouvement citoyen. Mais une fois encore, le pouvoir joue sur du billard. Dès qu’il entend des pétitions de justice, de progrès, de démocratie, venant de Kabylie, il découvre un appui inespéré parmi ses plus virulents opposants. La détestation commune de la Kabylie est un ferment assez fort pour réunir dans la même chéchia pouvoir et opposition épidermique… Et avec ça, on vient dire qu’il n’y a pas de problème kabyle ! Mais si, il existe. Mais pas là où on veut le mettre. Il est dans la tête de beaucoup de responsables et de militants issus du nationalisme canal historique ou d’époque tardive. Sous les applaudissements de militants de la démocratie de troisième dimension, c'est-à-dire invisibles, le pouvoir a réprimé systématiquement les mouvements venant de Kabylie, au prétexte qu’ils seraient le fait de «la main de l’étranger» exactement comme l’administration coloniale stigmatisait le soulèvement révolutionnaire de 1954 comme une manœuvre du Caire et de Moscou. Hélas, ce n’est pas la seule similitude !

 

De même que le FLN en était venu à mettre en œuvre une radicalité anticoloniale claire et nette, en conséquence de la surdité coloniale aux souffrances des colonisés, le pouvoir algérien autoalimente l’exacerbation de l’intransigeance kabyle en alternant, dans la réponse aux questions nationales posées par la Kabylie, répression et ruse. Pas besoin de se cacher la face, il y a un problème kabyle. Sinon, il n’y aurait pas de solutions…

 

L’ampleur que commence à prendre le Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie (MAK) est un symptôme de ce que la gestion manœuvrière de la revendication berbéro-démocratique par le pouvoir, en usant de la force, l’a poussé à se contraindre en question kabyle. Et ce n’est bien sûr pas en diabolisant encore une fois ce qui échappe au contrôle, qu’on réussira à relever les défis, résoudre les problèmes et apaiser le pays. Gouverner, c’est écouter…


Le problème kabyle n’est ni ethnique, ni seulement culturel… Il est politique et démocratique. Il incarne tous les échecs du pouvoir. En ce trentième anniversaire du Printemps berbère, il est utile de rappeler les propos du général Giap qui disait du colonialisme qu’il était un mauvais élève, parce qu’il n’apprenait pas ses leçons. Il n’est pas le seul !

A. M.

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