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4 Septembre 2015
Samia Zennadi est membre du collectif «Pour une Algérie Unie et Solidaire». Elle revient, pour Impact24, sur les conditions qui ont présidé à la création de ce Comité de vigilance et d’alerte. La crainte que le pourrissement ne conduise vers une situation de non retour, comparable à ce qui se passe en Syrie, mais aussi l’espoir d’unir les efforts pour garder l’Algérie unie et solidaire, conformément à l’esprit du Congrès de la Soummam en 1956, comptent parmi ces raisons. «(…) Il s’agit de la sauvegarde de l’héritage de la lutte de nos ancêtres et de nos pères contre la conquête coloniale», explique-t-elle dans l’entretien à suivre. Pour cela, elle invite tous les Algériens, à l’exclusion de ceux qui préfèrent un Etat-ethnique ou confessionnel à un Etat-national, à rejoindre le collectif qui, affirme-t-elle, ne sera, au aucun cas, l’appendice d’un parti politique.
Samia Zennadi, membre du collectif « Pour une Algérie Unie et Solidaire », Tharwa Fadhma N’Soumeur. Photo : DR
Par M. Nadir
Pourquoi un Comité de vigilance et d’alerte ?
C’est à la suite de plusieurs rencontres de concertation sur ce qui se passe à Ghardaïa que ce Comité de vigilance et d’alerte a vu le jour. Ses membres, d’abord en tant que citoyens, partagent le constat que depuis plus de deux ans, nous assistons impuissants à la recrudescence de la violence avec son lot macabre de morts, de blessés et de destruction sur différentes parties du territoire national. Cette nouvelle réalité, douloureuse et compliquée, est accentuée par des glissements sémantiques et des simplifications faussaires dans le traitement de l’information et de la gestion de la crise qui confortent le constat amer du recul de l’identité nationale, forgée dans le feu de Novembre 1954, au profit d’identités régionales, religieuses ou ethnico-religieuses. Au-delà de la douleur et de l’inquiétude que nous partageons, ce comité s’est constitué sur la base de la conscience aiguë de chacune et de chacun de ces membres qu’à Ghardaïa se joue le sort de l’Algérie et il s’agit de la sauvegarde de l’héritage de la lutte de nos ancêtres et de nos pères contre la conquête coloniale. La question-clé qui unit les initiateurs de ce comité est celle de la sauvegarde de cet héritage, l’existence de notre État-national avec toute la variété des composantes de notre Nation. C’est pour cette raison qu’il est ouvert à toutes les énergies, à toutes les sensibilités, à l’exclusion, bien sûr, de ceux qui rejettent l’idée d’un État-national au profit d’un État-ethnique ou confessionnel, et à toutes les propositions politiques d’éveil à la conscience des dangers, d’actions de solidarité, de programmes de rapprochement de tous ceux qui partagent le même souci national.
Quel regard portez-vous sur la gestion que les pouvoirs publics ont réservée à la crise de Ghardaïa, cet été ?
Nous avons beaucoup débattu au sein de notre comité sur les réponses apportées par les pouvoirs publics à cette crise. Mes camardes ont beaucoup de choses à dire sur ce sujet mais, pour ma part, je me suis déjà exprimée dès février 2014 dans un article «Alerte à la poudrière», coécrit avec mon camarade Mohamed Bouhamidi, sur la gravité de la situation et sur les conséquences d’une gestion «folklorique» et maladroite qui reprend et conforte les interprétations communautaristes des événements de Ghardaïa, reprises mot à mot des agences de presse étrangères.
Je ne crois pas avoir relevé que les pouvoirs publics ont pointé du doigt les facteurs de distorsions sociales et économiques qui ont conduit, peu à peu, au déchirement du tissu social. Je ne crois pas avoir lu une déclaration qui remet en cause la tenue des rênes économiques par des castes d’affairistes cannibales. Je ne crois pas que les pouvoirs publics ont reconnu que les directives du FMI et de la Banque Mondiale des années 80, encore d’actualité, sont responsables du recul de l’Etat sur des secteurs entiers, de la mise à mort de projets de développements solidaires et contribuent à l’épuisement de l’Etat-national. Je ne crois pas que les pouvoirs publics ont réagi fermement aux slogans des takfiris qui justifient le meurtre des ibadites. Malheureusement, les pouvoirs publics se contentent d’envoyer des «pompiers» pour éteindre le feu, sans s’attaquer aux foyers et aux éléments déclencheurs de ces explosions. L’échec des solutions appliquées montrent qu’elles ne correspondaient pas du tout à la nature du problème réel ni à son extrême gravité. Pire encore, les dernières arrestations et les conditions de détentions de militants séparatistes, rapportées par la presse, confirment la mauvaise gestion de la crise et préparent le terrain aux ingérences étrangères.